ECONOMIE

Budget de guerre en Haïti : un sursaut tardif face à une capitale livrée aux gangs

Port-au-Prince, 14 avril 2025 – Dans un contexte économique et sécuritaire particulièrement tendu, le Conseil des ministres haïtien a adopté ce lundi un budget rectificatif pour l’exercice fiscal 2024-2025, d’un montant total de 323,4 milliards de gourdes. Cette décision a été annoncée par le Ministère de l’Économie et des Finances (MEF) via un communiqué de presse.

Ce nouveau budget se veut équilibré, sans recours aux avances de la Banque de la République d’Haïti (BRH), et sera financé à hauteur de 217,5 milliards de gourdes grâce aux ressources collectées par les administrations fiscales et douanières.

Le document budgétaire repose sur cinq priorités stratégiques :

  1. Le renforcement de la sécurité publique et nationale ;
  2. Le redressement économique, la réhabilitation des infrastructures, la sécurité alimentaire et sanitaire ;
  3. La conférence nationale et la réforme constitutionnelle ;
  4. Le rétablissement de l’État de droit et de la justice ;
  5. L’organisation des élections.

La sécurité nationale au cœur du budget

Le gouvernement accorde une importance majeure à la sécurité, en allouant 11,8 % de plus aux institutions sécuritaires. La Police Nationale d’Haïti (PNH) voit ainsi son budget passer de 29,985 milliards à 32,935 milliards de gourdes, tandis que les Forces Armées d’Haïti (FAd’H) bénéficieront d’une augmentation de 1,4 milliard, passant de 6,976 à 8,376 milliards de gourdes.

Le budget rectificatif s’inscrit dans une logique de relance économique, de réforme institutionnelle, et de préparation à de futurs scrutins électoraux, dans un pays en quête de stabilité après plusieurs mois de crises.

Mais pour beaucoup d’Haïtiens, cette annonce arrive bien tard. Depuis plusieurs semaines, des milliers de familles ont fui les violences pour trouver refuge dans des camps de fortune à Delmas, Tabarre ou encore Carrefour. Là, des hommes, des femmes et des enfants dorment sous des tentes improvisées, sans eau courante ni électricité, exposés aux intempéries et à l’insécurité permanente. « On vit comme des bêtes. On a fui les balles pour dormir dans la boue », confie une mère de famille déplacée, les yeux cernés par la fatigue.

Alors que l’État tente de reprendre le contrôle d’un territoire fragmenté par la violence, ce budget est présenté comme une première étape vers une reprise en main. Toutefois, de nombreux observateurs pointent le manque de coordination, la lenteur des réponses et l’absence de soutien suffisant pour les populations déjà en détresse. Pour les habitants des camps, le budget de guerre ne suffira pas : ils attendent surtout des actes concrets, de la protection, et un retour à une vie digne.

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