Crise haïtienne : Réunion en vue entre Luis Abinader et les anciens chefs d’État dominicains

Le président dominicain Luis Abinader a annoncé vouloir convoquer les anciens présidents Danilo Medina, Leonel Fernández et Hipólito Mejía à une réunion sur la crise haïtienne, dans ce qu’il qualifie de « moment historique » nécessitant une réponse collective. Mais derrière cet appel à l’unité, certains observateurs y voient surtout une tentative de consolider une posture politique de plus en plus controversée.
La gestion de la migration haïtienne par le gouvernement d’Abinader a été marquée ces derniers mois par une répression sans précédent : expulsions massives, militarisation de la frontière, détentions arbitraires. Si ces mesures sont justifiées par l’exécutif au nom de la souveraineté et de la sécurité, elles ont été largement dénoncées par les défenseurs des droits humains, tant au niveau national qu’international.
Officiellement, il s’agit de « rechercher une position nationale unifiée » face à la crise haïtienne. Officieusement, cela ressemble à une tentative de partage des responsabilités, alors que les critiques contre la politique migratoire du gouvernement s’intensifient.
Leonel Fernández, désormais chef de l’opposition avec son parti Fuerza del Pueblo, n’a pas tardé à répondre : oui au dialogue, mais pas sans conditions. Il réclame des méthodes « plus crédibles » et déplore l’approche purement répressive du gouvernement. Le PLD de Danilo Medina, de son côté, exige une invitation formelle et rappelle qu’il a toujours été favorable au dialogue, tout en gardant ses distances.
Abinader, en convoquant ces figures politiques, tente peut-être aussi de réparer un rendez-vous manqué : en octobre 2023, son gouvernement avait signé un pacte national sur la crise haïtienne avec 28 partis… sans la participation des trois principales forces d’opposition. Aujourd’hui, il cherche à les ramener dans le giron, où la polarisation et la méfiance dominent le débat public.
Si le Abinader souhaite réellement une réponse unifiée, cela passera nécessairement par une remise en question de la ligne dure actuelle. Faute de quoi, cette initiative pourrait bien n’être perçue que comme une opération de façade visant à légitimer une politique migratoire de plus en plus critiquée pour ses dérives nationalistes, voire racistes.